mardi 25 août 2015

Au nom du père... dêchu. Physalis frappe encore fort !

Au nom du Père
Luca Enoch Andréa Accardi
Physalis, juin 2015

Au nom du Père est ce genre de bouquin qui ne paie pas de mine, mais possède une maquette suffisamment bien faite et intrigante pour vous attirer l’œil au milieu des autres albums.
Petit pavé au format non conventionnel pour une bandé dessinée : dos carré collé, et intérieur noir et blanc : ça sent bon l'alternatif.
Chez Physalis, nouveau petit éditeur montant, on a déjà aimé :  Catamount, chroniqué ici il y a peu.


Eva est une jeune beauté métisse black, qui  traîne le soir les quartiers mal famés  d'une grande ville indéterminée qui pourrait être dans le sud de la France, ou en Italie, vu l'origine des auteurs.  Elle Zigouille des malfrats, puis, après s'être évaporée, puis changée, passe le reste de la nuit en boite avant de rentrer dans son appartement sécurisé ou elle s'occupe de son père d'adoption handicapé suite à un AVC. Ce type est un ex mafioso planqué, et Eva, élevée à la dure, réalise des contrats, avec sa bénédiction.
Un jour, un quadruple contrat, très difficile, lui est proposé. Elle doit récupérer trois codes permettant de détourner un grosse somme d'argent. Dans quelle embrouille s'est elle fourrée ?...


Les flash-backs d'Eva
Je ne connaissais pas les auteurs, qui ont pourtant déjà publié quelques albums à série chez Soleil, entre autre. Il est fort à parier, néanmoins que, vu le niveau de ce polar bien nerveux et superbement dessinée, leur carrière pourrait connaître un rebond mérité.
Non seulement le scénario, certes assez classique dans le fond, (cf Léon au cinéma par exemple), possède de réelles qualités, avec un supplément d'originalité qui fait la différence, un bon sens du suspense, et une violence revendiquée assez jouissive. Mais le style graphique d'Accardi, avec son noir et blanc à la fois dynamique et aux aplats un peu charbonneux à l'occasion, rappellera par moments aux amateurs celui du grand Jordi Bernet. Une élégance qui fait la différence.

> Un roman graphique impeccable, et une belle découverte.

La page de l'album, sur le site de l'éditeur.

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jeudi 13 août 2015

Et si on revenait sur...Abe sapiens

Avant de reprendre les chroniques de nouveautés régulières très bientôt, ci-après un survivant des vacances, envoyé sur Facebook en Juillet, pour cause de souci technique, mais de retour ici, à sa juste place. (et toujours dispo en librairie.)

Abe sapiens
Vol 3 Nouvelle espèce
John Arcudi, Mignola, Scott Allie
Dessins : Sébastien et Max Fiumara
Delcourt juin 2014
L'univers tissé autour de Hellboy est riche et se développe en pleine autonomie, encore davantage depuis l'entrée aux enfers du colosse rouge cornu (Hellboy in hell. Dec 2012)
Celui-ci n'a en effet pas connu de nouvelles aventures solo depuis sa mort, ce qui a permis à la plupart de ses acolytes d'être mis en valeur. A l'instar du mutant mi-homme mi poisson Abe sapiens, dont  nous sont contées ci à la fois  les origines (par flashbacks), mais surtout la quête existentielle.
L'invasion de la terre par des créatures monstrueuses et démoniaques, usurpant l'identité et déformant l'apparence des humains qu'elles agressent n'a pas flanchée depuis le tome précédent. Et le Bprd (bureau pour la recherche paranormale et la défense) est sur les dents, tâchant tant bien que mal de la réguler. Pour se faire, la direction souhaiterait récupérer l'agent Abe sapiens qui a choisi de la quitter après les événements intervenus précédemment.
Ce dernier est choqué et cherche des réponses.

Tout au long de ce tome, sa fuite l'amènera à rencontrer quelques humains tentés par des croyances douteuses (mais rassurantes) persuadés que l'adoration de créatures démoniaques est la solution pour intégrer pleinement un monde nouveau. Ce sectarisme ne plaît pas du tout à notre mutant, qui ne souhaite de plus pas être pris pour un de ces monstres. Coincé entre plusieurs feux donc :  son ex équipe, une secte, et le combat à mener, celui-ci va tenter de découvrir au fond de l'océan, qui il est et ce qu'il peut réaliser pour ramener un peu de paix dans ce monde dévasté.
Cet épisode, paru il y a déjà un an passé, magnifiquement dessiné par la fratrie Fiumara est un hommage à peine déguisé à Lovecraft, mais aussi à Stephen King.
Les scènes de la plage avec ces monstres échoués, renvoient directement à l'histoire : "Les monstres d'Insmouth", tandis que la destruction par l'équipe du BPRD des abominations, et cette campagne désolée par les ravages qu'elles ont pu commettre rappelleront aux amateurs les scènes finales de "The Mist".
Quant à la quête désabusée d'un être mi-homme mi-poisson, cherchant sa réelle identité et son destin, comment ne pas l'associer au monstre de Frankenstein de Mary Shelley ?
A cet égard, la scène où celui-ci est agressé sur la plage par un jeune garçon voulant l'abattre, alors qu'il vient de passer un moment serein avec ses amis , et le fait que ce garçon soit "sacrifié" cruellement ensuite par ces innocents, par pure folie, est une des plus belles de ce tome, particulièrement poétique.
Un ouvrage fantastique, dans son terme le plus noble, et digne des plus beaux récits du genre.
A suivre donc, dans le tome 4 paru en Avril dernier.
> Tous publics (à partir de 10 ans), certaines scènes pouvant choquer.

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Analyses