dimanche 27 octobre 2013

Wizzywig : ce que vous voyez n'est pas ce que vous faites ! (Une histoire de Ed Piskor)


Wizzywig : portrait d'un hacker en série
Ed Piskor
Dargaud
Sept 2013

Dur dur de tenir le rythme d'une chronique par semaine;. vous l'avez peut-être remarqué.

Encore un bouquin déniché parmi les piles d'autres BD, par le côté peu courant de son propos, et son aspect : 
> un gros pavé de 297 pages, à la couverture sombre découpée en carrés, où apparaissent les portraits d'un jeune homme à l'identité changeante. Une de ses images, verte fluo, se dégage : serait-ce l'apparence réelle de ce hacker* dont parle le titre ?

Nous sommes dans les années 70, et Kevin J Phenicle est un jeune garçon, fils unique, qui est élevé par sa grand-mère. Il est isolé à l'école, car peu tourné vers les jeux (souvent lubriques) de ses camarades, et se passionne surtout pour tout ce qui touche l'électronique et l'envers du décor. Ayant peu de moyens, il trafique d'abord ses tickets de bus, qu'il réutilise à l'aide d'un oblitérateur de son cru, puis les machines à jeux, le téléphone, les premiers ordinateurs personnels, (l'occasion de se replonger dans les débuts de Mac).
La couverture US chez Topshelf
Il dévient rapidement et sans vraiment s'en rendre compte, un "hacker", sous le pseudonyme de Boingflop, dont l'unique plaisir sera de tricher et de manipuler les machines.

Ed Piskor, américain de Pennsylvanie, signe ici son premier livre solo, après "Macedonia" et "the Beats" (Emmanuel Proust, 2011) de Harvey Pekar, dont il a signé les dessins.
Il finit actuellement un autre roman graphique de loosers intitulé "Deleterious pedigree". Il est aussi l'auteur d'un comic-strip en ligne : "Brain rot", publié  via son site http://www.edpiskor.com.

Extrait de Brain rot sur le site de l'auteur ©Ed Piskor

L'histoire de Boingflop, c'est l'histoire imaginaire (mais fortement inspirée de faits réels) de tout ces hackers, qui ont un jour ou l'autre défrayé les chroniques médiatiques. Souvent de jeunes garçons doués en informatique qui ont montré le pouvoir que l'on pouvait atteindre avec un simple clavier, la connaissance des codes et un connexion réseau.
Dans cet hommage plutôt dramatique, même si Ed Piskor parsème son récit de moments savoureux assez drôles, l'auteur mélange le présent (via des témoignages de personnes qui ont connu Boingflop ou Kevin; et son combat aujourd'hui), et les flashbacks nous permettant de retracer le parcours de ce garçon, de son enfance, jusqu'à son arrestation et son incarcération, puis son procès.
Car si Kevin J Phenicle, traqué, a échappé à la justice de nombreuses années durant, il a au final effectué 6 ans de prison (plus une), sans procès, dans des conditions très dures qui ont abouties à son hospitalisation suite à une agression particulièrement violente.
P7 de l'edition us © Top shelf/Ed Piskor
Wizzywig (en fait : Wysiwyg : what you see is what you got > souci de copyright ?) est un ouvrage moderne, car traitant d'un sujet très contemporain, et bien documenté, mais au ton résolument objectif. Car les divers témoignages émaillant le récit permettent de moduler les propos plus subjectifs et engagés de Winston Smith, le copain de toujours de Kevin, qui ne cessera durant toutes ces années de se battre pour la réhabilitation de son ami, et l'obtention d'un procès, via son émission de radio sur WABCD 108.3 fm.

L'occasion de s'immerger de manière originale dans cet univers si souvent relégué aux faits divers, qui nous interroge sur les notions de propriété intellectuelle, de liberté d'expression, de justice, et du droit lié aux technologies de l'information dans notre société de consommation.

Une lecture donc plus que recommandée, qui n'apporte par vraiment de solution, mais pose la question du prix à payer lorsque l'on choisit un chemin sortant des clous.

(*Hacker, terme anglo-saxon, signifie utiliser une machine dans un contexte différent de celui pour lequel elle a été originellement conçue)

lundi 14 octobre 2013

Valiant comics en français : c'est maintenant !


Xo-Manowar
vol1 : l'armure de Shanhara
Robert Venditti/Cary Nord
Panini 100% fusion comics/Valiant


En 1992, Jim Shooter, ancien rédacteur en chef de Marvel rebooste les éditions Valiant, qu'il a créé deux ans plus tôt. l'idée : des publications dont les protagonistes font tous partie du même univers narratif. Les titres phares : Harbinger, Shadowman et Xo-Manowar sont un succès éditorial et public, grâce à la qualité de leurs récits et des artistes participants.
Mais Valiant est au final racheté, et perd pied.
Après de nombreuses rumeurs de renaissance, l'éditeur est enfin de retour en Mai 2012. La série Xo-Manowar est relancée et Robert Venditti passe au commandes pour réécrire ses origines, accompagné du grand dessinateur canadien Cary Nord (Bien connu pour ses superbes Conan scénarisés par Kurt Busiek).
Version 1992

… An 402, Aric de Dacia est un valliant guerrier Visigoth de l'armée d'Alaric 1er. Il combat l'empire romain afin de libérer son peuple. Mais le destin lui réserve un avenir inattendu, le soir où, s'infiltrant parmi leurs tentes, des créatures extraterrestres intervertissent un bébé visigoth avec l'un des leurs. Après une anicroche, ceux-ci emportent Alaric et quelques un de ses guerriers dans l'espace.
Esclaves pendant des années, torturés.. ces derniers n'ont qu'un occasion de s'échapper, s'emparer de l'amurerie. Mais la seule arme qui y trône est une armure magique et vivante, vénérée depuis des siècles, capable de rendre un élu autochtone surpuissant en ne faisant qu'un avec lui.
L'impensable va cependant se produire, qui va changer le destin d'Aric, et le ramener sur terre, mais... dans notre présent.

Il ne fait pas bon être esclave...

...Valiant n'était à ce jour connu en France que par les amateurs de comics acharnés lisant en VO. Le fait que Panini se soit lancé en Septembre 2013 dans la publication de ce relaunch est une très bonne chose.

Mêler l'ancien et le moderne (antiquité et Sf ici) n'est pas chose complètement nouvelle, et on pourra se remémorer Cowboys et envahisseurs, ou dans une domaine plus lointain : le classique John Carter.. mais ce Xo-manowar a le mérite d'allier, à la trame sans défaut du récit , un suspens de qualité et une intrigue, qui, si elle revient sur le principe souvent visité de la vengeance, lui apporte un souffle nouveau.
Car si Aric a montré sa valeur au sein de son époque lointaine lors des scènes d'introduction, et que sa captivité nous plonge ensuite dans une ambiance space opéra dramatique du meilleur effet, (pouvant un peu rappeler la Planète des singes d'ailleurs), lui et son armure vont au final atterrir (au sens propre comme au figuré) sur notre bonne vieille planète, en Italie, provoquant un rebondissement inattendu et très intéressant. 
Quoi de plus paradoxal en effet pour celui qui voulait chasser les romains ?, d'autant plus qu'il est alors traité comme un extraterrestre.  
Et ses anciens maître ne sont pas loin. Intégrés de manière secrète depuis des siècles, ceux-ci comptent bien récupérer leur armure magique. 
On plonge dés lors dans une sorte de polar où le héros devient un fugitif recherché.

L'idée originale de ce relaucnh de Xo-manowar fonctionne à merveille sous les dessins dynamiques de Cary Nord,  et le suspens de cette fin de volume laisse entrevoir des rebondissements intéressants, clôturant celui-ci en beauté, et le rendant particulièrement attachant.

Nb : Le tome 1 d'Harbinger est déjà disponible chez le même éditeur, et les titres Bloodshot , Archer & Armstrong suivront.

Analyses