mercredi 25 mai 2016

Planet bitch : you're a baaaad mama you know !?

Bitch planet extraordinary machine
Kelly sue Deconnick
Valentine de Landro
Wilson IV
Glénat comics
Mai 2016

OK, je ne la vous ferai pas trop facile cette fois ci : je connais assez peu la scénariste de ce pavé pulp comics, pourtant superbe auteure de mainstream avec Spider-man, Gardians of galaxy...Captain Marvel, ou aussi le chapitre 5 du Feu et la roche (licence avp), ni le dessinateur principal Valentine...

Quant au super Robert Wilson IV qui illustre le chapitre 3 avec un goût vintage exquis, c'est sa première apparition en cartonné par ici. 


Bitch planet, c'est une planète faisant office de prison pour tout un tas de femmes, jugées trop violentes par leurs pères, non conformes par la société patriarcale punitive de ce futur proche. 

Toutes ces femmes rebelles, trop grosses, sadiques, trop sexy...sont traitées comme des parias et n'ont qu'une issue : combattre entre elles et gagner lors de jeux violents retransmis en direct sur terre. 
Évidemment, la résistance va s'organiser.

Kam©De Connick/De Landro
Bitch planet convie le pulp dans sa présentation, avec moult visuels d'accroche façon affiches de propagande ou de spectacle à sensation. De fausses publicités vintage sont aussi disséminées entre les 5 chapitres que compte ce recueil et il ne s'agirait pas d'un comics a tendance SF , on jurerait tenir un pulp seventies dans les mains, façon blaxploitation. Il faut dire que l'héroïne principale : Kam, est black et porte une belle afro. 



Penny Rolle ©WilsonIV/Deconnick
Sur l'aspect scénaristique, rien à redire : on est dans le pur jus de tension et de suspens que peut nous procurer ce genre d'histoire, entre un Rollerball, New york 1997, Outland, et mettez ce que vous voulez pour l'aspect carcéral, même si on ne peut s'empêcher de penser a Hunger games pour le jeu sadique, et White mama, black mama, ou Femmes en cage, films seventies qui ont pu influencer les auteurs. 



Rythme soutenu, découpage racé et personnages top. Dessin moderne efficace, avec un style donc different et plus vintage pour les origines de Penny Rolle, et couleurs agréables. Superbes galerie de couvertures...tout cela fait de Bitch planet un très bon comics encore repéré par Olivier Jalabert pour la collection Glénat comics. A suivre...

En bonus à cette édition : une couverture inédite, un appareil critique sur le féminisme et la culture populaire rédigé par Pia-Victoria Jacqmart, des interviews exclusives des auteurs, des fausses-pubs.



lundi 16 mai 2016

Dash Shaw persiste, et signe un Doctors déroutant.

Doctors
Dash Shaw
Ca et là
Janvier 2015

On entre dans Doctors comme dans un rêve, ou plutôt un cauchemar.  Se demandant où est-ce que l’on est, ce que l’on va y trouver…et si un fil narratif il y a. Mais connaissant déjà Dash Shaw (cf le psychédélique Body World entre autre, déjà chroniqué par ici), on sait que l’on a affaire à un auteur très particulier, au talent cependant énorme. Pas de crainte donc quant à la qualité normalement intrinsèque d’une de ses oeuvres.

Une jeune fille grimpe à un arbre aux fourches étranges, puis tombe.
Madame Bell fait son jogging dans la rue. Cette femme blonde, ménagère quadragénaire à première vue, s’arrête près d’un arbre, et semble reconnaître ses drôles de branches, comme celles qu’elle avait grimpées étant enfant. Puis elle se dirige vers la piscine, un peu inconsciemment.. rencontre un homme ressemblant un peu à son mari décédé… puis, ..tombe et se heurte violemment la tête contre l’échelle du bassin.
On la retrouve néanmoins page suivante, chez elle, avec ce même homme rencontré… et leur flirt paraît irréel, avec des dialogues incohérents.. jusqu’à ce que la fille de celle-ci, : Laura, apparaisse et lui tienne des propos encore plus étranges : celle-ci serait en réalité morte depuis peu … et Laura serait là pour la chercher, lui permettre de revenir avant que son cerveau ne s’éteigne définitivement (…) Laura s’appelle en réalité Tammy Cho, et est au service de son propre père , un médecin, ayant mis au point un système : le Charon, permettant ce prodige.

©Dash Shaw/çaetlà

Tout d’abord, la maquette de ce petit livre : au papier glacé et aux pages toute imprimées dans un coloris différent. De quoi être dérouté. Ensuite, un déroulé à première vue incohérent. Jusqu’à la page 17 tout d’abord, puis 22/23, où l’on comprend effectivement qu’il s’agit bien d’une expérience clinique. On va ensuite suivre la « résurrection « de madame Bell, et sa difficulté à réintégrer une société dans laquelle elle a perdu ses repères… puis d’autres voyages.
En fait, comme le dit le professeur Cho, inventeur de Charon : « Tout ce que nous faisons, c’est ressusciter les riches, pour qu’ils puissent gérer l’avenir de leur patrimoine avant leur mort prochaine ».

Le dessin de Dash Shaw n’est pas ce que l’on peut trouver de plus joli dans le milieu, mais vous savez sûrement, si vous êtes un lecteur régulier de ce blog, que la cohérence d’une bande dessinée passe par l’équilibre bien dosé d’un bon scénario et d’un dessin compréhensible. C’est le cas ici, avec en supplément un découpage relativement simple et une maquette plutôt originale, assez agréable au final.

On ressort de Doctors dans un état second, ayant eu l’impression d’un voyage d’entre les morts, exactement comme la patiente du docteur Cho, et cela m’a rappelé à titre personnel le film Carnival of souls (Herk Harvey, 1962.), où une bande de jeunes ayant eu un accident se retrouve à errer parmi d’autres personnes hagardes, dans un univers parallèle, représenté par un parc de loisir abandonné au bord de la plage.

Un nouveau roman graphique incroyable et très déroutant, comme on la l’occasion d’en lire assez peu souvent. 

Recommandé, donc !

La page du livre chez l'éditeur : http://www.caetla.fr/Doctors

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lundi 9 mai 2016

EXO : rencontre du cinquième type avec Jerry Frissen.

EXO Tome 1/3 Darwin II
Jerry Frissen/Philippe Scoffoni
Humaines associés Avril 2016

Dans un futur très proche, à bord d’une nation orbitale américaine.
Alors que tout se déroule tranquillement, la soudaine apparition d’un objet non identifié amène le chaos au sein de l’équipe en place. Ce qui semblait être une petite météorite traverse en effet un module de part en part, tuant au passage un des astronautes alors en sortie réparation.

Sur terre, alors que l’on apprend qu’une exoplanète habitable « Darwin II » a été détectée,  et qu’une sonde : « Astroglider 4 », lancée en 1996,va être reprogrammée pour aller l’explorer, une équipe est préparée pour la Lune, car il semblerait que le projectile ayant détruit la station américaine ait été lancé » de là-bas. (!?)

Ce dernier s’est entre temps crashé sur terre, et cet objet, extra terrestre, envoie dans l’environnement de petites sondes volantes. Celles-ci vont prendre possession de la volonté de quatre personnes distinctes, dont Charles Webster, un malade psychiatrique. Le groupe va de son côté tenter de prendre le contrôle d'un cinquième homme : John Koenig, un astro physicien de la Nasa.
Leur mission: empêcher par tout moyen que la mission Darwin n’atteigne son but.

Beaucoup de mystères dans ce premier tome, mais une trame intéressante qui ne manquera pas de rappeler cependant aux amateurs le scénario de Rencontre du troisième type (Spielberg, 1978). Ne serait-ce que part l’idée du regroupement de personnes dont l’esprit a été mis sous contrôle, autour d'un même but.
P.5 ©Frissen/Scoffoni/Humanoiïes associés

Jerry Frissen est surtout connu pour sa série Lucha libre (avec Bill) et sa participation scénaristique aux légendaires Méta Barons, de Jodorowsky. Il aime les séries B (voire Z), (voir sa création « Les Zombies qui ont mangé le monde » dessin : Guy Davis, 4 tomes entre 2004 et 2208), mais il semblerait que ce nouveau triptyque de science-fiction soit calibré pour apporter une aura un peu plus réaliste à sa bibliographie.

Les personnages sont plutôt bien campés, et si la trame de ce premier épisode nous convie davantage au polar, les dernières scènes sur la Lune, au fort potentiel SF et fantastique offrent de belles perspectives pour la suite.
Le suspens est en tous cas bien maîtrisé, et le dessin de Philippe Scoffoni (série Milo avec Benoit Rivière), au trait onctueux, aussi agréable que celui d’un Chris Lamquet, possède, en plus de couleurs très réussies, un charme indéniable.


Une série à suivre.

Analyses