L'homme qui tua Lucky Luke
Mathieu Bonhomme
Lucky comics
Avril 2016
Dés les premières pages, où l'on assiste en accéléré à la scène de la mort de notre héros, scène de flash back, on sait que cette aventure hommage, et donc cet album, ne va pas nous laisser de marbre et qu'un ton bien spécial va y être employé.
Page 2, voilà la nuit, la pluie, et Lucky Luke, trentenaire avec dans son dos déjà toutes ses aventures connues, comme un bagage réaliste dans l'ouest créé par Mathieu Bonhomme, qui débarque de manière presqu'incognito dans la ville de Froggy town.
A peine laissé son célèbre Jolly jumper à l'étable, que les ennuis commencent : le shérif fait le malin, et tente de provoquer notre cowboy en duel. Qui ne souhaiterait en effet pas "se faire" le Légendaire Luke ? Lui à qui l'on doit les arrestations de Phil Defer, des cousins Daltons...
Ces éléments, rappelés par les villageois eux-mêmes, font plaisir, car replacés dans un contexte semi réaliste, ils attestent de fait de la même réalité des précédents albums classiques du cowboy. D'ailleurs, page 27, c'est au tour d'un personnage déjà vu dans l'épisode "Règlement de compte" (in "La corde du pendu", Morris & Gosciny, 1982) de faire une apparition tonitruante et bienvenue dans l'histoire.
On pourra essayer, sous forme de jeu, (allez, je vous attends !), de trouver d'autres références aux albums de Morris, mais c'est bien ce "règlement de comptes" qui va graver au fer la trame générale du récit.
©Matthieu Bonhomme/Lucky comics |
Car à Froggy town, où presque tout le monde craint le justicier à la chemise jaune, plus qu'on ne le respecte, les trois frères Bone, affaire familiale et ripoux de la police locale, vont de leur côté jusqu'à le provoquer, pour une raison inconnue. Mais eux le savent... Tandis que Doc Wednesday (ça aurait pu être Doc Holliday, de Règlements de comptes à OK coral, première référence cinématographique : John Ford, 1946 ) est le seul personnage a peu près d'aplomb à avoir un peu de sympathie pour lui. Pauvre Luke, (oh, le jeu de mot !), qui va courir durant toute la première partie du récit après un peu de tabac, cause pénurie, tandis qu'il va prendre sur lui de poursuivre l'enquête que les villageois lui ont confiée dans un premier temps, puis retirée.
L'autre référence cinématographique, c'est celle du jeu de carte de la mort de Wild Bill Hickock lorsqu'il s'est fait assassiner*.
Et c'est ce fil, celui où le héros qui fait de l'ombre doit disparaitre, qui va sous tendre l'essentiel de l'album, rappelant, et ce, dès le titre, le superbe : L'homme qui tua Liberty Valance de John Ford (1962)
Nombreuses sont les autres images marquantes (L'attaque de la diligence par un indien solitaire, le cheval perdu/abandonné dans la montagne près d'un lac...les mineurs qui partent en expédition punitive...) qui rappelleront des scènes ou des ambiances de westerns classiques aux amateurs.
La fin, quant à elle, en volte face, avec son message de paix, de repentance, et tout l'espoir qu'elle transmet, clôt de belle manière un récit hommage aux trois grands média que le western a pu compter : les pulps, le cinéma et la bande dessinée.
...Si Morris serait certainement content, et ses lecteurs aussi, c'est donc autant et surtout aux amateurs de western en général à qui Mathieu Bonhomme a pensé j'imagine, en réalisant ce bel album aux ambiances de film.
...Pour un auteur qui nous a déjà donné le superbe Texas cowboys avec Lewis Trondehim, on peu dire que le western lui va très bien.
(*) On pourra voir Wild Bill, de Walter Hill, 1995.
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